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Droit : nom de domaine, marque, mot clé et concurrence sur le net

15 février 2013 17:03

Dans un arrêt de rejet du 25 septembre 2012, la Chambre Commerciale Cour de Cassation aligne sa position sur celle prise par la CJUE dans son arrêt du 23 mars 2010 et dans son arrêt rendu le 22 septembre 2011 (Affaire C-323/09) dans l’affaire opposant Mark & spencer et Interflora . Maître Monfray nous renseigne sur le sujet.

La Cour de Cassation confirme ainsi que l’emploi d’une marque comme mot-clés ne constitue pas en soi un acte de contrefaçon faute d’atteinte à la fonction d’identification de la marque dans l’attendu suivant :

"Mais attendu que l’arrêt constate certes que les mots clés "autoies", "auto-ies", "auto ies" et "ies" sont identiques aux marques dont la société Auto IES est titulaire et qu’ils sont utilisés comme mots clés pour déclencher l’affichage de liens promotionnels vers des sites sur lesquels sont proposés des produits et services identiques à ceux pour lesquels les marques sont enregistrées ; qu’il relève toutefois que les annonces, qui sont classées sous la rubrique "liens commerciaux" et qui s’affichent sur une colonne nettement séparée de celle afférente aux résultats naturels de la recherche effectuée, avec ces mots clés, sur le moteur de recherche de Google, comportent des messages qui, en eux-mêmes, se limitent à désigner le produit promu en des termes génériques ou à promettre des remises, sans référence implicite ou explicite aux marques, et sont chacune suivies de l’indication, en couleur, d’un nom de domaine ne présentant aucun rattachement avec la société Auto IES ; que la cour d’appel, qui en a déduit que chaque annonce était suffisamment précise pour permettre à un internaute moyen de savoir que les produits ou services visés par ces annonces ne provenaient pas de la société Auto IES ou d’une entreprise qui lui était liée économiquement mais, au contraire, d’un tiers par rapport au titulaire des marques, ce dont il ne résultait, en l’espèce, aucune atteinte à la fonction d’identification d’origine de la marque, a pu, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deuxième et quatrième branches, retenir qu’aucun acte de contrefaçon de marque ne pouvait être imputé à M. X... et aux sociétés Car Import et Directinfos.com ; que le moyen n’est pas fondé."

S’il n’y a pas contrefaçon de marque en soit par l’utilisation de mots clés, il faut tout de même se livrer à une appréciation au cas pas cas pour le vérifier comme le préconisait la CJUE.

 

Que sont le service Google "AdWords", les "mots clés" et les mots "clé-négatifs" ?

Le service AdWords de Google est un outil de référencement payant, par opposition au référencement naturel. Il permet d’augmenter l’audience d’un site internet par son affichage dans la rubrique "lien commerciaux" de Google. C’est grâce à la sélection de mots-clés et/ou de mots clés négatifs par le client du service Google AdWords que va être déclenché cet affichage. Ainsi dès lors que des mots identiques aux mots-clés réservés sont renseignés par un internaute dans le moteur de recherche Google, l’affichage du site Web du client dans la rubrique "liens commerciaux" est déclenché, et ce en plus des résultats dits naturels.

A quelles conditions un titulaire de marque peut interdire l’usage d’un signe identique à un tiers et que sont les fonctions essentielles de la marque auxquelles il ne doit pas être porté atteinte pour la CJUE et la Cour de Cassation ?

En application de l’article 5, paragraphe 1, sous a), de la directive 89/104 ou, en cas de marque communautaire, de l’article 9, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 40/94, le titulaire de la marque est habilité à interdire l’usage, sans son consentement, d’un signe identique à ladite marque par un tiers, lorsque cet usage a lieu dans la vie des affaires, est fait pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, et porte atteinte ou est susceptible de porter atteinte aux fonctions de la marque. Selon la CJUE , ces fonctions essentielles sont principalement les suivantes : l’indication d’origine, la publicité, et l’ investissement.

Cf le point 77 de l’arrêt du 23 mars 2010 qui rappelle :

"Parmi ces fonctions figurent non seulement la fonction essentielle de la marque qui est de garantir aux consommateurs la provenance du produit ou du service (ci-après la « fonction d’indication d’origine »), mais également les autres fonctions de celle-ci, comme notamment celle consistant à garantir la qualité de ce produit ou de ce service, ou celles de communication, d’investissement ou de publicité (arrêt L’Oréal e.a., précité, point 58). " ( NDLR : arrêt du 18 juin 2009, L’Oréal e.a., C487/07 - point 58 ).

 

Et le risque de parasitisme ?

S’il n’y pas contrefaçon en soi et par principe, il peut y avoir parasitisme par l’emploi de mots clé reproduisant la marque d’un concurrent, ou même son nom de domaine, ou sa raison sociale ! C’est ce que nous enseigne la Cour d’appel de Paris dans son arrêt du 13 juillet 2012 en considérant qu’il y a là trouble manifestement illicite justifiant la compétence du juge des référés et une mesure d’interdiction d’utilisation du mots clé constituant la marque déposée :

"Mais considérant que l’internaute qui souhaite obtenir des renseignements sur une entreprise qui propose ses produits ou services en ligne afin, le cas échéant de contracter avec elle, doit effectuer une recherche en utilisant sa dénomination sociale, son nom commercial ou comme en l’espèce, son nom de domaine ; que le fait pour la société Go Assurances, exerçant dans le même secteur d’activité que la société Lucheux de référencer son propre site à partir du nom de domaine sur lequel la société Lucheux a un droit privatif, lui permet de bénéficier du trafic généré par le nom de domaine "Assurpeople" et de son site de publicité sur internet qui est, de surcroît, le seul support par lequel la société Lucheux propose ses services à la clientèle et d’en détourner la clientèle à son profit ; que la « réservation » par la société Go Assurances de différentes variantes du mot clé "assurpeople" ainsi que de mots clés voisins correspondant au nom commercial et de domaine de la société Lucheux constitue, à l’évidence, une atteinte aux droits dont cette société dispose sur sa dénomination sociale, générant nécessairement une confusion dans l’esprit de la clientèle ; que ce comportement constitue un acte de concurrence déloyale et du fait de l’immixtion dans le sillage économique de la société Lucheux, un acte de parasitisme ; qu’il en résulte nécessairement un trouble manifestement illicite que la liberté du commerce ne saurait autoriser et qu’il convient de faire cesser, sous astreinte, comme il sera dit au dispositif, sans qu’il y ait lieu de se prononcer sur le préjudice invoqué par la société Lucheux qui n’en tire toutefois aucune conséquence devant la cour."

 

Moyens techniques :
Domaine.info

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